Soutenance de thèse de Loïc QUEVAREC

Ecole Doctorale
Sciences de l'Environnement
Spécialité
Sciences de l'environnement: Environnement et santé
établissement
Aix-Marseille Université
Mots Clés
rayonnements ionisants,évolution expérimentale,adaptation locale,coût adaptatif,Caenorhabditis elegans,
Keywords
ionizing radiation,experimental evolution,local adaptation,adaptive cost,Caenorhabditis elegans,
Titre de thèse
Réponses évolutives de populations de nématodes (Caenorhabditis elegans) exposées à des rayonnements ionisants
Evolutionary responses of nematode populations (Caenorhabditis elegans) exposed to ionizing radiation
Date
Vendredi 28 Octobre 2022 à 14:00
Adresse
Cadarache, 13108 Saint-Paul-lez-Durance
Amphithéatre ECO BIAM « Cité des énergies »
Jury
Directeur de these Mme Christelle ADAM GUILLERMIN IRSN
Rapporteur Mme Marie-Agnès COUTELLEC INRAE
CoDirecteur de these M. Jean-Marc BONZOM IRSN
Rapporteur Mme Céline PELOSI INRAE
Examinateur M. Olivier ARMANT IRSN
Examinateur M. Denis RéALE Université du Québec À Montréal
Examinateur Mme Claudia COSIO Université de Reims Champagne-Ardenne
Examinateur M. Arnaud CHAUMOT INRAE

Résumé de la thèse

Les pressions anthropiques sur les écosystèmes, comme les pollutions par des substances radioactives, peuvent mettre à mal la survie et le maintien des populations. Face aux stresseurs, les individus peuvent répondre rapidement par plasticité phénotypique et à plus long terme, les populations peuvent s’adapter. Toutefois, ces réponses s’accompagnent de coûts en ressource et peuvent induire une perte de fitness dans d’autres environnements. Mais si ces réponses sont insuffisantes, les populations peuvent décliner, voire disparaître. La prise en compte de ces mécanismes est importante pour améliorer l’évaluation des risques écologiques d’une contamination de l’environnement et en particulier pour estimer les conséquences des stresseurs, telle que la pollution radioactive, sur l’évolution des populations et leur maintien à long terme. Dans ce contexte, l'objectif de ce projet est d’étudier expérimentalement l’évolution de populations de Caenorhabditis elegans exposées à des rayonnements ionisants gamma (Cs-137) et d’évaluer les coûts associés. Pour cela, des populations de C. elegans ont été exposées à trois débits de dose (0 - 1,4 et 50 mGy.h-1) pendant 20 générations. Plusieurs traits d’histoire de vie ont été mesurés : la croissance des populations, la fréquence des mâles, le succès d’éclosion, la fécondité individuelle et à l’échelle de la population. Les modifications des traits observés ont été étudiées à l’aide de transplantations réciproques et de modèles mathématiques pour établir les causes sous-jacentes de ces changements. Enfin, les populations qui ont évolué dans les différentes conditions d’irradiation ont été exposées à un second stresseur, la bactérie pathogène Serratia marcescens, afin d’estimer les coûts adaptatifs. A 50 mGy.h-1 nous avons observé une diminution globale de la croissance des populations, de la reproduction, de la survie des embryons et de la fitness, mais une augmentation de la fréquence des mâles par rapport à la condition contrôle. A 1,4 mGy.h-1, nous avons mesuré une diminution de la fécondité à l’échelle de la population et de la fitness et une augmentation de la croissance des populations et de la fréquence des mâles par rapport à la condition contrôle. De plus, nos résultats montrent qu’une pression de sélection s’est exercée sur les populations exposées aux rayonnements ionisants ce qui a conduit à une adaptation de ces populations. Les résultats suggèrent une tendance évolutive vers une amélioration de la survie des embryons et une histoire de vie plus lente en réponse à une faible irradiation. Au fort débit de dose, une amélioration de la fitness a été observée en quelques générations. De plus, l’irradiation favorise la reproduction par croisement (outcrossing). Ces changements se sont accompagnés de coûts. La diminution du succès d'éclosion et de la taille de ponte tardive des populations irradiées remises dans un environnement non irradié démontre la présence de coûts adaptatifs aux rayonnements gamma. D’autre part, l’évolution des populations sous rayonnements ionisants a induit un coût sur la capacité de survivre face à une bactérie pathogène. Ces résultats montrent qu’une pression anthropique comme les rayonnements ionisants peut modifier la trajectoire évolutive d’une population, questionnant sur la survie à long terme de ces organismes et soulignant la nécessité d’une telle démarche dans le cadre d’une évaluation du risque écologique.

Thesis resume

Anthropogenic pressures on ecosystems, such as pollution by radioactive substances, can affect the survival and maintenance of populations. Faced with stressors, individuals can respond rapidly through phenotypic plasticity and in the longer term, populations can adapt. However, these responses are accompanied by resource costs and can lead to a loss of fitness in other environments. Nevertheless, if these responses are insufficient, populations may decline or even disappear. Considering these mechanisms is important to improve the ecological risk assessment of environmental contamination, and in particular to estimate the consequences of stressors, such as radioactive pollution, on the evolution of populations and their long-term maintenance. In this context, the aim of this project is to experimentally study the evolution of Caenorhabditis elegans populations exposed to gamma ionizing radiation (Cs-137) and to evaluate the associated costs. For this purpose, C. elegans populations were exposed to three levels of ionizing radiation (0 - 1.4 and 50 mGy.h-1) for 20 generations. Several life history traits were measured: population growth rate, male frequency, hatching success, individual and realized fecundity. The observed trait changes were studied using reciprocal transplants and mathematical models to establish the underlying causes of these changes. Finally, populations that evolved under the different radiation conditions were exposed to a second stressor, the pathogenic bacterium Serratia marcescens, to estimate adaptive costs. We observed for high dose rates a decrease in population growth rate, reproduction, embryo survival and fitness, but an increase in male frequency compared to the control condition. We observed for low dose rates a decrease in realized fecundity and fitness, and an increase in population growth rate and male frequency compared to the control condition. Furthermore, results showed that selection pressure was exerted on populations exposed to ionizing radiation leading to adaptation. Results suggested an evolutionary trend towards an improvement of embryo survival and a slower life history in response to low dose rates. We observed that fitness increased within a few generations for high dose rates. In addition, irradiation promotes reproduction by outcrossing. These changes were accompanied by costs. The lower hatching success and late brood size of the irradiated populations back to the control environment reveal some costs of adaptation to gamma radiation. In addition, the evolution of populations under ionizing radiation induced a cost on survival to a pathogenic bacterium. Our results show that an anthropogenic pressure such as ionizing radiation can modify the evolutionary trajectory of a population, questioning the long-term survival of these organisms and highlight the need for such an approach in the context of an ecological risk assessment.